International Museum Day – 2019

In the context of International Museum Day, the Mauritius Museums council has organised an Exhibition on, “Le Naufrage du Saint-Géran et la Légende de Paul et Virginie” at the National History Museum, Mahebourg. The Exhibition  will be opened for visits until the end of August 2019.

International Museum Day - 2019


Le Naufrage du Saint-Géran et la Légende de Paul et Virginie

Il y a 275 ans, au large de l’Ile d’Ambre, s’échouait le Saint-Géran. Coïncidence curieuse : ce navire portait les premières machineries pour la sucrerie nouvellement fondée de la VilleBague et Labourdonnais, qui les avait commandées, les attendait impatiemment pour faire sa première coupe. Il transportait aussi une quantité importante de pièces d’argent contenues dans dix-huit caisses destinées à l’île de Bourbon.

Ce vaisseau était aussi attendu impatiemment par toute la population, car l’année précédente, la sècheresse avait détruit les récoltes et celles-ci venaient d’être encore ravagées par des sauterelles; de plus, un navire qui devait rapporter du riz de l’Inde était revenu vide.

La perte du Saint-Géran était donc un grand malheur qui mit l’Ile de France, au point de vue de son ravitaillement, dans une situation si critique que le Gouverneur Labourdonnais dut rationner la population, ce qui ne fit pas plaisir aux habitants.

Le Saint-Géran était un grand et beau vaisseau de la Compagnie des Indes, du port de 600 tonneaux, bien connu à l’Ile de France où il avait fait plusieurs voyages heureux. Malheureusement, pendant son dernier séjour à Lorient, on en changea le capitaine, et on le mit sous les ordres de M. Gabriel Richard de la Marre. Le vaisseau était armé de 30 canons. Il y avait, à bord, en partant de Lorient, 186 personnes tant en passagers qu’en équipage.

Le Saint-Géran mit à la voile le 24 mars 1744. Après vingt-deux jours d’une traversée heureuse, il relâcha à l’île de Gorée. On y embarqua vingt noirs et dix négresses yoloffs. La traversée de Gorée à l’Ile de France fut moins heureuse. Le 17 août, vers 4 heures de l’après-midi, le bâtiment se trouvait par le travers de l’île Ronde, à 18 milles de la terre. Le temps était splendide et le capitaine avait décidé de donner dans les îles et d’aller mouiller dans la Baie du Tombeau, mais hélas ! ses seconds l’en dissuadèrent en assurant qu’il n’y avait aucun danger à mettre à la cape jusqu’au jour. Ils confondirent probablement le Coin de Mire avec l’île Ronde.

Cet avis fut suivi, car on continua à courir des bordées en s’approchant si près de terre que, vers 2 heures et demie du matin, le drame se produisit : la barre du gouvernail se cassa, le devant du vaisseau toucha la lame qui était très grosse, le prit sur le travers et le poussa sur les récifs de l’île d’Ambre où il se coucha. On sonna la cloche d’alarme, tous les passagers accoururent en désordre sur le pont, des embarcations furent mises à la mer. Le mât d’artimon fut coupé et jeté par-dessus bord pour soulager le navire, mais, sans cesse ramené par les vagues contre le vaisseau, il fracassa les chaloupes de secours. La quille se brisa par le milieu, la poupe et la proue se dressèrent alors presque verticalement. Tout était irrémédiablement perdu. L’aumônier du vaisseau, le Père Martin Burke, du Convent des Billettes à Paris donna l’absolution et la bénédiction générale pendant qu’équipage et passagers entonnaient le Salve Regina et l’Ave Maris Stella.

Le commandant ayant donné à chacun la liberté de se sauver, les plus vigoureux s’élancèrent dans les flots : la plupart périrent, bien peu réussirent à franchir la ligne des brisants. Deux jeunes filles n’avaient osé quitter le vaisseau, et deux jeunes officiers épris d’elles, étaient aussi restés à bord et tentèrent vainement de les sauver.

Ce fut la dernière scène du drame. Neuf naufragés furent seuls sauvés et se réfugièrent sur l’île d’Ambre, où ils passèrent deux jours dans le plus grand dénuement. Ces neuf rescapés étaient : Alain Ambroise, bosseman, Pierre Tassel, bosseman, Pierre Vergore, adjudant canonnier, Jean Janvrin, pilotin, Aimé Carret, patron de chaloupe, Jacques Le Guen, matelot charpentier, Thomas Chardron, matelot, Jean Lepage, matelot et Jean Doimat, passager.

Ambroise, Tassel et Chardron s’embarquèrent sur une jumelle pour gagner la grande terre. Ils furent recueillis, dans les environs de la Mare aux Flamants, par des chasseurs qui portèrent ensuite secours aux autres naufragés sur l’île d’Ambre.

Les drames maritimes de ce genre fertiles en résultats immédiats, étaient cependant, trop fréquents à l’époque pour que leur côté tragique prît une intensité assez grande pour frapper à jamais l’imagination populaire. Le souvenir de cet évènement devait donc normalement s’effacer et tomber dans un oubli définitif.

Mais un homme de génie devait en réveiller le souvenir et l’immortaliser à jamais.

Vingt-quatre ans après le naufrage, en 1768, débarquait à l’Ile de France un jeune homme qui devait s’illustrer plus tard, Bernardin de St. Pierre.

Il passa deux ans dans notre île. C’est ici qu’il fit cette étude approfondie et philosophique de la nature qui est le thème essentiel de toute son œuvre.

C’est ici qu’il apprit, par les habitants, tous les détails de la catastrophe du Saint-Géran et qu’il en fit un des plus beaux chapitres de l’ouvrage qu’il préparait.

C’est ici qu’il peignit ses touchants tableaux avec tant de charme et de vérité.

C’est ici, enfin, que, grâce à son génie, il conçut cette œuvre d’une si touchante et si admirable simplicité : Paul et Virginie, œuvre unique en son genre, qui marque un moment dans l’histoire de la littérature française et à laquelle le temps n’a rien enlevé de sa fraicheur première. Il est sacré ‘père de la littérature pittoresque’. Napoléon Bonaparte son admirateur lui ouvrit les portes de l’Académie française, en 1803.

En mars 1966, M. Paul Daniel ayant appris qu’une cloche de bronze avait été découverte dans les environs de l’île d’Ambre par des pêcheurs sous-marins qui l’avaient brisée pour la revendre. Il s’empressa de la racheter pour la somme de 260 roupies et de la reconstituer en faisant ressouder les morceaux épars.

235 ans après le naufrage, l’archéologie sous-marine permet d’apporter un certain nombre de réponses aux questions posées par ce naufrage. Arrivée à l’île Maurice en janvier 1979, la mission de M. Jean-Yves Blot, archéologue sous-marin, et M. Alain Le Houx, ingénieur français, sous le patronage de la Commission Nationale de l’UNESCO du Ministère de l’Education et de la Culture, a permis d’aboutir à une série de découvertes fort intéressantes sur le site réel du naufrage et sur l’histoire du navire à travers des recherches préliminaires en archives, et grâce à l’étude des objets récupérés de l’épave. Tous ces objets se trouvent aujourd’hui au Musée d’histoire nationale de Mahébourg.

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